La crise de la musique ? Quelle crise ? Rapport Sacem 2008

Comme nous le notions l’an dernier à la même époque, la crise de la musique n’est pas celle que l’on veut nous faire croire.

En effet, le rapport annuel 2008 de la SACEM permet, encore une fois, de fortement relativiser les discours catastrophiques des acteurs de la filière musicale. Non,la situation est très loin d’être catastrophique du point de vue des artistes en termes de droits perçus.

Les chiffres 2008 affichent une très faible baisse des droits perçus (-0,4%) soit 755,8 Millions €, soit leur niveau de 2006 (voir graphique) . On est donc très loin du discours des maisons de disque qui constatent une baisse beaucoup plus significative de leurs ventes depuis plusieurs années et donc de leur chiffre d’affaires (pour celles qui ne sont pas éditrices et donc détentrices des droits de diffusion).
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source: SACEM, rapport annuel 2008

Les montants des droits au titre de la copie privée sont quant à eux en légère baisse (-4,2%, voir graphique) malgré la multiplication des supports taxés par les décisions de la commission Albis (voir article sur cette commission), preuve que les consommateurs achètent de nombreux supports à l’étranger par le biais d’Internet pour échapper à cette taxe incohérente (taxer la copie privée alors même qu’elle est interdite par la loi est une belle incohérence de notre droit fiscal).

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source: SACEM, rapport annuel 2008

Si la SACEM se plaît à mettre en avant la baisse des droits liés aux supports physiques (disques et DVD), elle ne met jamais en avant la progression des plates formes de distribution numériques, ou pour dire simplement qu’elles ne compensent pas à ce jour la baisse des revenus physiques. Constatons tout de même avec la SACEM que la progression des droits liés aux ventes numériques est de 41 % en 2008 (voir graphique) : c’est la catégorie de droits qui croît le plus fortement depuis deux ans !


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source : SACEM, rapport annuel 2008

Il serait temps en 2009 que l’industrie musicale cesse de nous faire croire à la catastrophe alors même qu’elle a été jusqu’ici incapable de s’adapter de façon pertinente aux nouveaux comportements de consommation de la musique liés à la révolution digitale. Et plutôt que de pleurer les temps anciens qu’elle facilite la gestion des droits au niveau européen, véritable obstacle au développement des plates-formes de distribution numérique.
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Copie privée, commission d'Albis: la fin d'un modèle

La France est un des pays dans lequel il existe une taxe sur la copie privée. Le droit de copie privée est considéré comme un manque à gagner par les auteurs, producteurs et ayant-droits. Depuis 2001, il existe une taxe sur les supports numériques alors même que la loi DADVSI interdit quasiment la copie privée (voir article). L’extension de cette taxe à de plus en plus de supports numériques (CD, DVD vierges, clé USB, téléphones portables, baladeurs numériques) a fini par profondément agacer l’industrie de l’électronique qui se voit injustement taxée, objectant que ses produits ne sont pas la cause de pratiques illégales.

Après avoir déposé un recours au Conseil d’Etat, ce dernier vient de donner raison aux industriels. Comme l’explique Christiane Féral-Schuhl dans une tribune au Journal du Net, « l'arrêt du Conseil d'Etat est important car, en annulant les barèmes fixés pour les supports numériques concernés par la décision n°7 (baladeurs, enregistreurs de salons et DVD vierges), il impacte plus largement le mode de calcul de la rémunération qui a été mis en oeuvre pour toutes les autres décisions de la Commission copie privée. D'autres recours sont d'ailleurs pendants devant le Conseil d'Etat, notamment contre les décisions n°8, 9 et 10. » Autrement dit la copie illicite ne peut être une base pour asseoir une taxation !

D’une façon plus générale, on ne peut qu’attendre avec impatience les propositions d’Eric Besson, secrétaire d’Etat à l’économie numérique, en la matière issues des Assises du Numérique. Il semble, en effet, que la commission d’Albis ne pourra continuer à siéger sous sa forme actuelle, tant sa légitimité est désormais affaiblie après les départ des industriels et un tel arrêt du conseil d’Etat.

La France va-t-elle enfin entrer de plein pied dans l’ère du numérique ? Va-t-elle mettre en cohérence la loi DADVSI avec l’existence d’une taxe sur la copie privée? Rien n’est moin sûr. La loi LME votée au printemps 2008 semble ignorer certains aspects propres à la vente électronique. Pour d’autres raisons, on s’apprête déjà à créer une taxe sur le chiffre d’affaires des opérateurs Internet et mobiles. Quand donc ce pays se donnera-t-il la chance d’entraîner pleinement dans le numérique ?
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La fin des DRM se confirme pour 2008

Après EMI, Warner et Universal Music, il semblerait que Sony BMG se plie également à la décision d'abandon des DRM. Si l'on peut se réjouir d'une telle décision pour le confort d'utilisation que cela va apporter au client final, il semble malheureusement que ce genre de décision arrive bien trop tardivement ! L'iPod est disponible depuis 2001 et Napster est apparu en 1995! Une décennie, c'est le temps que cette industrie aura mis pour commencer à comprendre les tenants et les aboutissants de la recompostion de la chaîne de valeur. La structure oligopolistique de cette indutrie y a été pour beaucoup et il n'est pas certain que la perennité soit encore assurée pour cette industrie.
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Le marché des droits en 2006: Rapport de la SACEM

La SACEM vient de mettre en ligne sont rapport pour l'année 2006 (disponible ici).
L'extrait suivant traduit bien l'évolution du marché des droits :"Côté bilan d’activité, pour la première fois depuis 1992, l’exercice 2006 s’est conclu sur une stagnation des perceptions (-0,2%),résultat essentiellement dû à la chute de 10,2% des droits perçus au titre du secteur phonographique. Les droits provenant de la diffusion publique ont eux progressé de 5,9%, lespectacle vivant continuant de faire preuve d’une excellente santé"
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Les droits pour la copie privée diminue également à 49,7 millions €. Il s'agit donc de la première fois depuis 1992 que les droits collectés diminuent (très faiblement cependant -0,2%). La colelcte sur les CD et DVD diminuent de 9,9% mais dans le même temps, les droits collectés sur le spectacle vivant progressent fortement (+7,4%) avec une très forte progression sur les tournées (+29,1%).
Globalement on est donc encore très loin de la notion de crise de la musique telle que l'industrie du disque s'évertue à faire passer dans les médias. Après une progression continuelle des droits collectés, 2006 marque un tournant dans la structure des droits collectés traduisant l'évolution de l'industrie musicale. Les concerts constituent désormais une alternative importante pour les maisons de disques à tel point que certaines rachètent des tourneurs.
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