Comment
l'industrie du disque peut-elle se sortir de la situation
actuelle?
Une chute de
la demande qui ne s'explique pas uniquement par le
téléchargement illégal...
Après plusieurs années de lutte sur le front juridique, sur
lequel elle a obtenu quelques succès, et sur le front
technologique, sur lequel elle a obtenu beaucoup moins de
succès, l'industrie du disque a-t-elle réellement apporté
une réponse stratégique à la situation qu'elle connaît
depuis au moins cinq années.
Rappelons brièvement la situation: une baisse d'environ 30%
du marché en volume en 7 ans. Accusant, les TIC comme
source principale de cet effondrement du marché,
l'industrie du disque n'a guère apporté de réponse de fonds
à la baisse de la demande. Les études scientifiques
sérieuses ne montrent aucun lien de causalité probant entre
téléchargement illégal et baisse des ventes.
Une offre
standardisée et aseptisée,de nouveaux comportements de
consommation...
L'industrie du disque continue à développer des produits
standardisés pour un marché mondial. Elle continue à vendre
des produits à cycle de vie très court (type Star Academy,
Nouvelle Star, etc...) sans répondre à de très nombreuses
autres demandes. Aucune réponse n'est apportée aux
substituts qui sont venus concurrencer la musique : les
jeux vidéos.
Il apparaît clairement que de nombreux consommateurs ayant
déjà payé plusieurs fois la musique qu'il possède sous
plusieurs formats (cassette audio, vynil, CD) ne veulent
pas payer la musique en fonction du format imposé par la
technologie du moment, mais sont prêt à payer la musique
quel que soit sont support final. A cet égard, les
évolutions technologiques récentes ont contribué à modifier
profondément les comportements des consommateurs. Les
consommateurs, plus particulièrement les plus jeunes
d'entre eux, utilisent de nouveaux canaux de communication
: messagerie instantanée, téléphone mobile, blog.
Quelles
réactions stratégiques de la part de l'industrie?
Fàce à cette situation, forcfe est de constater que les
réactions de l'industrie du disque sont bien timides. Elle
a certes favorisé l'émergence de plate-formes de
téléchargement légal, mais en donnant des armes à ces
nouveaux distributeurs qui gèrent directement la relation
avec le client final. Apple est ainsi devenu un acteur
incontournable avec lequel les négociations commerciales
ont récemment tourné en sa faveur (notamment sur la
politique de tarification). Alors même que les marges dans
la distribution numérique sont bien supérieures à celle de
la distribution physique (42 centimes d'euros reversés sur
1 morceau à 99 centimes d'euros), les majors ont tenté
d'introduire une tarification discriminante avec des prix à
1,29€, 1,59€ 1,79€ ! Augmenter le prix
lorsque la demande chute ne semble pas réellement une bonne
stratégie de long terme.
La téléphonie mobile,
comme canal de distribution.
Les majors ont ensuite cherché à investir le canal de
distribution téléphone mobile. Mais là encore, elles se
contentent de fournir des sonneries vendues à des prix
exorbitants. L'offre de téléchargement sur les
téléphones/walkman numérique reste très limitée et concerne
uniquement le format singles, très apprécié par les jeunes.
Mais la encore, d'autres acteurs entrent dans la
concurrence: les opérateurs et les fabricants de téléphone,
comme Nokia qui a récemment pris le contrôle de Loudeye,
grossiste détenteurs d'importants catalogues de droits
éléctroniques. Nokia entend bien monter sa plate-forme de
téléchargement, tout comme SonyEricsson, grâce à l'ex
plate-forme Connect. Ici encore, on voit mal comment le
partage des revenus sera favorable à l'industrie du disque
devant composer avec des opérateurs et des constructeurs.
Marketing Interactif, CRM,
blog: où sont les majors ??
Alors même que les consommateurs les plus jeunes passent de
nombreuses heures à consulter les blogs dans une logique
communautaire, voire tribale, aucune réflexion quant à un
modèle économique reposant sur ce phénomène n'a encore été
imaginé. Or, force est de constater qu'il y a là un réel
potentiel pour bâtir un modèle d'affaires reposant sur la
gratuité et le parrainage. Les réseaux sociaux (les tribus)
sont constituées d'individus qui partagent les mêmes
intérêts, ont des affinités fortes. Aussi, la notion de
prescription y est-elle forte. Un modèle de rémunération de
la prescription sous forme de points donnant droit à
l'achat de musique serait certainment une voie à explorer
au plus vite.
En outre, d'autres catégories de consommateurs attendent
une offre plus pointue de la part des maisons de disque.
L'application des méthodes de marketing client serait tout
à fait appropriée. Encore faut-il pour cela maîtriser le
lien avec le client final, ce qui n'est pas forcément le
cas sur les plate-formes de téléchargement comme Napster,
Rhapsody, ou iTunes.
On le constate donc, le marketing des maisons de disque,
fonction créatrice de valeur dans la chaîne de valeur, est
à réinventer au plus pour s'adapter aux nouveaux
comportements de consommation de la musique et répondre à
une demande très éclatée qui utilise de nouveaux canaux de
communication et d'interaction.